dimanche 19 juillet 2015

Ma séance de bodypainting

Read this post in English at the bottom of the page. Special thanks to Jessica for the translation.





Après avoir longuement réfléchi, j'ai choisi de ne pas laisser interférer mon propre ressenti sur le bodypainting dans le récit que j'ai fait du parcours de Marina. Je ne peux néanmoins pas faire silence sur l'expérience que j'ai vécue, tandis qu'elle peignait et que nous parlions.
Comme je l'ai écrit dans le précédent article, et avec un peu d'avance sur la suite d' "Angelina Jolie... et les autres",  je confiais à l'artiste mon espace intime, lieu de déchirure, de deuil et de douleur mais aussi d'espoir, de reconstruction, de terrain lentement reconquis sur la vie et les sens.
Après avoir dépassé la pudeur qui retient toujours un peu le geste, l'appréhension tombe et je me montre sans fard. Dans les yeux de Marina, je ne vois pas les cicatrices. Je ne perçois que le tableau qu'elle imagine. Le premier coup d'éponge me surprend toutefois. Je me sens barbouillée. Au sens propre. Après les chirurgiens et les infirmières, c'est à la peintre que je confie mon buste, cette fois pourtant de mon plein gré. Je retiens mon souffle.

Le dernier fil de la dernière intervention s'est résorbé il y a quelques jours à peine et la peau est rosacée à l'endroit où le bistouri est passé. Heureusement, Marina, que j'ai encouragée à se raconter, parle, étonnée elle-même de son propre flux de paroles. Chacune de nous se prête à quelque chose de totalement inédit, ce qui scelle la complicité de l'instant. Le vert et le bleu se mélangent, le blanc se pose par touches. Je vois le pinceau se déplacer. Parfois, j'ai presque la sensation agréable des poils légers de l'outil  sur ma peau, mais c'est fugace... C'est comme si mes yeux transmettaient l'information à mon cerveau, qui, se remémorant la sensibilité de cette zone-là, me donnait un petit aperçu en lot de consolation... Impression étrange de carton pâte ! N'y penser pas.
Le travail est long. Il fait terriblement chaud. On a la chance que je ne transpire pas. Marina est penchée sur son ouvrage, recule, revient. Je la laisse modeler un nouveau et éphémère visage à mes seins. Je vois apparaître des bulles. Air neuf à respirer... 
Plusieurs heures de minutie et de patience plus tard, le résultat est là !
Algues, eau, ciel... une sirène timide cherche à sortir de sa tanière sous-marine. Elle a envie de chanter, danser, voler, essayer...

C'est le moment de la séance photo. Poser, s'exposer, lâcher. Marina guide et suggère.




Je m'inquiète déjà de la tenue du dessin... Il est décidé de le garder jusqu'au lendemain après application du fixateur et il est convenu d'un nouveau défi : sortir dans la rue, vêtue, sur mon jean, d'une simple tunique en dentelle.

Après une courte nuit, juchée sur mes talons pailletés, je descends, dans l'air encore frais du matin, à peine couverte par une étoffe blanche dont les mailles très lâches laissent deviner la peinture sur ma peau nue.
Mon cœur palpite de cette bravade adolescente qui me fait pourtant me sentir tellement vivante, tellement invincible. Quelque chose explose dans ma poitrine qui ressemble à un morceau de bonheur, capté là, comme ça. Je me tiens droite et tente d'oublier, malgré la douce brise qui caresse mes seins bleutés, que je ne porte rien d'autre que les couleurs de l'espoir. En fait je n'oublie pas. Je suis fière d'oser. Je me rends compte que ça ne fait pas mal, pas honte. Je le sais pourtant. Pourquoi faut-il que la vie doive me le rappeler parfois avec tant de rudesse ? 
Une voiture passe, une vitre se baisse, un compliment jaillit... et je souris.
Je marche seule...
Vers mon destin. Je le veux aussi libre qui soit, rempli d'amours possibles, de réalisation de rêves, de paix et de sérénité... et d'un grain de fantaisie.





Merci à Marina...
www.facebook.com/TohuBohuHappyFacePainting
tohubohumaquillage@hotmail.fr 




My body painting experience


After much thought, I chose not to allow my own thoughts and emotions on my body painting experience seep into my account of Marina’s personal journey. Yet I cannot remain silent about the time we spent together; us chatting, her painting. As mentioned in my previous article, and as I will touch on in the follow up to “Angelina Jolie... et les autres”, I trusted this artist with one of the most intimate areas of my body; an area which has suffered great pain, destruction and mourning, yet which is also full of hope of being rebuilt, slowly regaining sensation and feeling.

After the initial awkwardness, all nervousness fades and I reveal my naked body. In Marina’s eyes, I do not see my scars. All I see is the painting she has in her mind. The first stroke of the sponge surprises me. I feel smeared. Literally. After the surgeons and nurses, it’s with a painter to whom I entrust my breasts, yet this time of my own accord. I hold my breath.

The final stitch from the last operation dissolved just a few days ago and my skin is red where the scalpel sliced its way through. Fortunately, Marina, who I encourage to speak, surprises herself with a steady flow of conversation. We both prepare ourselves for something out of the ordinary, which seals the complicity of the moment. Green and blue combine, with white accents here and there. I see the brush move. Sometimes, the feathery brush strokes on my skin are almost pleasant, although it is fleeting...it’s as if my eyes are transmitting information to my brain which, recalling the sensitivity of this area, gives me a small insight into my consolation prize...a strange cardboard-like feeling. I try not to think about it.

Marina’s task is no short affair, and it’s incredibly hot outside. I’m lucky that I don’t sweat much. Marina leans into her work, takes a couple of steps back, then returns. I allow her to give my breasts a new, temporary appearance. I see bubbles starting to appear. Fresh air to breathe...
After several hours of meticulous work and patience, her work is complete!

Seaweed, water, sky...a shy mermaid seeks to leave her underwater lair. She wants to sing, dance, fly, live her life...
It’s now time for the photoshoot. Pose, expose oneself, let go. Marina guides me and gives suggestions.


I’m immediately concerned about the staying-power of Marina’s artwork....I decide to wear it until the next day and she applies a fixing agent to ensure it stays put. I agree to another challenge: go out in public wearing only a pair of denim jeans and a simple lace tunic.

After a sleepless night, I step outside into the fresh morning air in a pair of sequin heels, my skin barely covered thanks to a loose, sheer fabric which subtly reveals a glimpse of Marina’s artwork on my naked body.

My heart beats wildly thanks to this newfound adolescent bravado which makes me feel so alive, almost invincible. In that moment, something in my chest explodes, happiness radiates from within. I stand tall with my head held high, despite the gentle breeze that caresses my blue breasts; I wear little but the colours of hope. I’ll never forget. I’m proud to be bold. I realise that it doesn’t hurt and I’m not ashamed. But I know. Why must life remind us of the harshness we have endured?
A car drives past, the window winds down and a yell of appreciation ensues. I smile. I walk alone...

Towards my destiny. I want to be free as a bird, live a life filled with future lovers, make my dreams reality, find peace and be serene...something out of this world.

 translated by Jessica Rose March

 

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