lundi 31 décembre 2018

Minuit au lit

Cette injonction de faire la fête le 31 décembre ! Cela horripile Antoine. La bande de potes l’a appelé, un peu au dernier moment. « On se retrouve tous chez Pascal. Tu viens ? ». C’est tentant, on va rire et picoler. A minuit, il y aura bien un couillon pour avoir pensé à sortir les langues de belle-mère et les cotillons. On sera ensemble. Chacun noiera son désespoir dans un verre de prune ou de poire. Antoine regarde Juliette. Sa fiancée est installée sur la méridienne. Elle a arrêté de lire. « A quoi penses-tu ? » demande Antoine. « A ce qu’on va bien pouvoir inventer pour ce réveillon ! ». La jeune femme sourit.
« Et si on ne bougeait pas d’ici ? ». Juliette regarde Antoine, amusée. Il a son air de ne pas y toucher. Les yeux du type qui prépare un bon coup : « Je m’occupe de tout ! ». Il descend chez le traiteur au coin de la rue et choisit, un peu au hasard, quelques douceurs parmi les plats n’ayant toujours pas trouvé preneur à 19 h. Puis, il fonce à la pâtisserie et chez le caviste. Enfin, il rentre à la hâte avec son butin. Le camoufle dans le réfrigérateur. Juliette n’a rien vu. Enroulée dans un plaid, elle regarde pour la cent douzième fois “Autant en Emporte le Vent”.
Antoine s’active en cuisine. Vers 21 h, il allume les bougies, tout est prêt. A la radio, Juliette Armanet susurre doucement : « C’est lui l’amour de ma vie, je sais que c’est lui, tout me le dit ». Le téléphone sonne. Antoine décroche : « Non, on reste là, tout va bien, amusez-vous ». Juliette chante avec Juliette : « En lui tout est infini, le jour comme la nuit, je suis à lui ».
A 23 h 30, Juliette et Antoine se glissent, nus, dans leur grand lit. N’est-ce pas merveilleux de terminer l’année de cette façon ? Il est minuit dix. Encore mélangés, Antoine et Juliette se regardent : « Bonne année mon amour ! ».

Jetlag

Cette année, John a décidé d’épater Tatiana. Il est fou amoureux de cette russe de vingt ans sa cadette et il a décidé de rendre ce réveillon inoubliable. Ou plutôt ces réveillons. John a plus d’un tour dans son sac. D’un saut de jet, ils se sont rendus de Londres à Paris. Impossible d’envisager les fêtes de fin d’année sans un passage chez Dior et Cartier. 29 décembre. Après le shopping, direction Le Bourget. On part à l’autre bout du monde. Là où c’est l’été. Destination : Sydney, Australie. Tatiana marque un temps d’arrêt. A-t-elle bien emporté ses bikinis, ses tenues de plage et ses robes légères ? Oui. Elle sourit aux anges et John n’est pas mécontent. Il a sa « résidence secondaire dans tous les Hilton de la Terre ». Champagne, petits fours. La vie est une fête permanente. A Sydney, on retrouve la Jetset. Le yacht de Bernard est en position. A minuit, le 31 décembre, douze minutes de pause pour admirer les feux d’artifice lancés des quatre coins de la baie dans une synchronisation parfaite. Happy New Year. Dans les rires, John lance : « Hey, here we go again ?* » Sur le tarmac, Tatiana met du temps à remarquer qu’on n’embarque pas dans l’appareil habituel : « Qu’est-ce que ça veut dire ? ». « On part fêter le nouvel an à Los Angeles Baby ! » annonce John, pas peu fier de son effet. 19 heures de décalage horaire séparent Los Angeles et Sydney. Il est donc possible de célébrer deux fois le Nouvel An en se rendant d’abord à Sydney, puis à Los Angeles. La planète tourne sur elle-même à une vitesse de 1 670 km/h. Aucun avion civil n’est suffisamment rapide pour physiquement remonter dans le temps, mais le Gulfstream G650ER, le jet privé le plus rapide du monde, est capable de le rattraper en se déplaçant d’est en ouest… « Amazing » s’exclame Tatiana en battant des mains.  John pose une paume sur les reins de sa dulcinée pour l’aider à pénétrer dans l’avion. Faire plaisir à la femme qu’on aime, ça n’a pas de prix !

*On remet ça ?

mardi 25 décembre 2018

Solidarité en Seine


Marie se prépare pour un Noël peu ordinaire. Avec son mari et leurs quatre enfants, de grands adolescents très sympathiques, elle a mis en place une tradition pour le 24 décembre. Les repas de famille interminables où parfois l’hypocrisie fait foi, très peu pour elle. La messe de Minuit ? Voir son odieuse voisine du cinquième pencher religieusement la tête et tendre la main en signe de paix, sourire angélique aux lèvres, avant de déverser son fiel à peine sortie de l’église ? Ça lui donne la nausée. Non, Marie a décidé de vivre sa foi en l’humain en entraînant toute sa famille pour un réveillon solidaire au fil de la Seine.
Le Secours Catholique, avec l’Association des Cités du Secours Catholique, invite environ 600 personnes – des familles et des personnes isolées, accompagnées ou hébergées tout au long de l’année par le Secours Catholique et l’ACSC – à vivre une soirée un peu exceptionnelle : un réveillon “dîner croisière” sur la Seine, à bord de cinq bateaux-mouches spécialement affrétés. Marie et sa famille sont bénévoles. Ce soir-là, ils se mobilisent avec une centaine d’autres volontaires pour servir, animer et partager. L’occasion pour eux d’agir concrètement au service de l’autre, de mettre en pratique l’esprit de Noël. Il fait nuit quand les premiers participants montent à bord. Tout est prêt. Les tables rondes ont été dressées, des paillettes saupoudrées sur la nappe. Le menu cartonné posé au centre.
Une population chamarrée se mêle aux bénévoles. Lesquels sont le plus heureux ? Difficile de le dire. On parle, on chante, on danse. On rit, on plaisante, on apprend à se connaître. On se découvre dans un cadre différent. Roger, sans domicile fixe, s’est mis sur son 31. Il commente : « C’est chouette de se retrouver un petit peu comme en famille ». Une jeune femme maquille les enfants qui le souhaitent. Des ballons de baudruche s’envolent. Marie sourit à son mari. Tout cela donne du sens à la vie. Leur famille a beaucoup reçu, elle trouve normal de “redonner”. Nicolas, son petit dernier, 16 ans, râle pour tout à la maison. Casque sur les oreilles, allure dégingandée, il traîne son adolescence depuis le canapé du salon jusqu’au ramassis de bazar qui lui sert de chambre. Marie s’époumone souvent. Ce soir, il passe à côté d’elle avec un plateau chargé de vaisselle sale. Il lui fait signe et  glisse : « On passe un bon moment, hein ? J’aime bien faire plaisir aux gens, me sentir utile ! ». Quel beau cadeau ! Marie se dit : « Le voilà le miracle de Noël ! ».


dimanche 23 décembre 2018

Divins enfants

 Monique, furibonde, raccroche le téléphone. Ils commencent à la chauffer sérieusement. Faites des gosses, tiens ! Entre celui qui veut passer quelques jours aux sports d’hiver, la bru qui refuse de laisser ses parents, les ex avec lesquels il faut jongler, Monique en a ras la frange de Noël. Couper les cheveux en quatre depuis des années et trouver une date pour satisfaire tout le monde, elle ne peut plus ! Elle entre dans le bureau de Georges, bien décidée à lui faire admettre qu’il faut jeter l’éponge ou il y va de sa santé mentale. Il ne la laisse pas parler : « Viens t’asseoir à côté de moi » ordonne-t-il. Son sourire bienveillant apaise immédiatement Monique. D’un signe de tête, il lui suggère de jeter un coup d’œil à la page internet qu’il est en train de consulter sur son ordinateur. « Ma chérie, prononce-t-il tout doucement, cela fait bientôt un demi-siècle que nous bichonnons tout le monde. Il serait peut-être temps qu’on s’occupe un peu de nous ! Non ? ».


Pas besoin de plus de mots. Le programme est décidé en quelques minutes. Le 19 décembre, on réserve un vol Paris-Tel Aviv. Un joli hôtel de la vieille ville, dans le quartier de Jaffa, permettra de se reposer avant de prendre la route vers le nord en direction de Haïfa, Saint-Jean d’Acre puis Nazareth. Monique et Georges rêvent de ce voyage depuis des années, sur les pas des premiers chrétiens. Retour au sud-est pour rejoindre Jérusalem, berceau des trois grandes religions monothéistes. Le 24 décembre, on se rendra à Bethléem pour assister à la messe traditionnelle en l’église franciscaine Sainte-Catherine, chapelle latine de la basilique de la Nativité. Certes, le décor n’a pas grand chose à voir avec l’étable, mais quel chrétien n’a pas espéré y faire le pèlerinage ? La deuxième partie du voyage sera moins spirituelle et plus touristique. Direction le Sud avec une halte sur la Mer Morte, dans laquelle Georges a toujours eu envie de plonger. Enfin, plonger… se laisser flotter. Évasion au milieu du Néguev ensuite, avant d'achever le séjour à Eilat, ville peu intéressante mais posée dans un décor somptueux. C’est là, au bord de la Mer Rouge, face aux montagnes pourpres et ocres de Jordanie que Monique et Georges basculeront dans la nouvelle année. Les pieds dans l’eau pour fêter cinquante années d’amour.


Contes de fin d'année


Mamy n’aime pas les huîtres. Le beau-frère de Michel est un abruti. Il passe sa soirée du réveillon à critiquer le repas et les convives. Les enfants sont surexcités. Stéphanie a autant envie de décorer le sapin que de se pendre. Il reste environ cinquante lignes sur la “to-do” liste à quelques heures de la réception. Vous avez échangé plus de cinq noms d’oiseaux avec votre chéri(e) dans les dernières 24 heures… Bref, vous en avez ras la casquette des fêtes de fin d’année ! Vous êtes mûrs pour changer de cap et choisir des agapes insolites !


A suivre, histoires courtes à lire avant, pendant et après Noël.
  
Je vous souhaite de Joyeuses Fêtes !