C'est sous un ciel sans nuages et des vignes inondées de soleil que se déroule la récolte 2015. Les vendanges sont un moment à part dans la région. Tout ce qui s'y rapporte devient prioritaire. Rite immuable, c'est une parenthèse sacrée. Les avancées technologiques ne permettent pas tout et l'on travaille (presque) comme autrefois, ce qui rend l'instant intemporel, renforçant sa magie.
A Meursault et dans toute la côte, les cours des
maisons et domaines s'ouvrent sur les portes béantes de cuveries ; il y règne une
activité débordante dix jours par an. Les vignes se remplissent de grappes de
vendangeurs qui manient sécateurs, seaux et hottes avec dextérité. Le ballet
incessant des tracteurs qui transportent des remorques chargées de raisins
donne au village l'aspect d'une ruche où chacun s'affaire selon un rôle défini de manière ancestrale.
A la cuverie et malgré l'effervescence, il y a
toujours quelqu’un pour prendre le temps d’expliquer ce qui se passe. Quand le
raisin arrive, il est directement déversé sur une table de tri. Sur le côté de
la remorque, des bâtonnets tracés à la craie indiquent le nombre de hottes dont
elle a été remplie. Le viticulteur peut ainsi estimer sa production sachant
qu'il faut environ huit hottes pour une pièce (220 litres). Le raisin tombe
ensuite dans une curieuse machine. L'égrappoir sépare les grains de raisin des
tiges. Ainsi, le raisin poursuit sa route jusqu'aux cuves tandis que les rafles
sont ramassées et entassées avant d'être brûlées.
Ici, les enfants, comme Obélix, tombent dedans tout petits, et évoluent en spectateurs pour les plus jeunes, en vrais acteurs pour les plus grands.
Le vin rouge fermente en cuve. On procède au
pigeage (du latin populaire : pinsiare, écraser) manuellement, avec un outil nommé "pigeou"; des filins assurent la sécurité des
ouvriers, exposés aux émissions inodores mais mortelles de CO2. Jus et peau
restent ensemble car c'est la peau qui donne sa couleur au vin rouge. La
"densité", quantité de sucre contenue dans le liquide, est scrupuleusement
et régulièrement relevée. Nous avons assisté à une manipulation intéressante et
spectaculaire. Pour faire éclater les derniers grains et exploser les arômes,
le viticulteur renverse de la neige carbonique dans la cuve. La fumée qui
s'échappe amène avec elle des effluves de fruits rouges particulièrement
intenses.
Le vin blanc lui, fermente en fûts. Nous
descendons à la cave où un tonneau à couvercle transparent permet d'observer la
lie. En remontant, nous nous arrêtons au pressoir (qui n'a certes plus rien à
voir avec les pressoirs que l'on peut voir par exemple au Clos de Vougeot). On remplit
deux bouteilles de petit jus, ou vin doux. Le futur vin est pour l'instant un
onctueux nectar gorgé de sucre dont on se délecte chaque fois qu’on nous en
offre (ceci est un appel !)
L'origine de la "paulée" provient
vraisemblablement du patois "paule" qui signifie pelle. Il s'agirait
de la dernière pelle de raisins versée dans le pressoir symbolisant la fin des
vendanges. La Paulée, donc, réunira bientôt tout le monde dans une joyeuse
fête. Auparavant, les véhicules, décorés de branchages et chargés de
vendangeurs en liesse, paraderont en klaxonnant au retour des vignes pour
signifier la fin des vendanges.
En se promenant plus tard dans les vignes, on
découvre et on déguste quelques raisins oubliés. C'est le grappillage !
(Attention, c'est une pratique désormais interdite)
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