lundi 21 décembre 2020

Un petit tour du côté de chez Maupassant

 

Sous le Guy

 


Quand mon fils, en quatrième, m’annonce que « Les contes de la bécasse » de Guy de Maupassant figurent en bonne place au programme de français cette année, je reste dubitative. Malgré une offre pléthorique en littérature jeunesse, on a un mal fou à faire lire nos enfants. Diantre, ces garnements de 13 ans pourraient-ils nourrir un quelconque intérêt pour des histoires souvent sordides se déroulant pour la plupart au fin fond de la Normandie ? La preuve par l’expérience (et quelques conseils de lecture).

 

Guy de Maupassant a l’âge de nos collégiens lorsqu’il est renvoyé de son institution religieuse pour avoir produit des textes subversifs. Si on lui avait dit, alors, que ses écrits seraient un jour étudiés dans les mêmes établissements que celui duquel il était banni, quelle aurait été sa réaction ? Un auteur allemand, Arne Ulbricht, s’est récemment penché sur la biographie de l’écrivain, mort à quarante-trois ans des suites, entre autres, de la syphilis. L’occasion pour le lecteur de passer de l’autre côté du miroir. De marcher dans les pas d’un enfant choyé par sa mère et amoureux de la nature. Puis de suivre un jeune homme avide d’écriture. Flaubert entre dans la danse et on a l’impression d’être dans le salon avec eux lors de leur première rencontre. De la pièce de théâtre pornographique initiale à la parution des nouvelles et romans, en passant par les emplois dans l’administration et les séances de canotage sur la Seine, la vie de Maupassant est décortiquée dans un style à la fois précis et pudique, soutenu par une documentation solide. « Cette crapule de Maupassant » est incontestablement le roman qu’il faut à ceux qui veulent en savoir plus.

 

Mais revenons à mon collégien. Contre toute attente, il a dévoré les « Contes de la Bécasse » en moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire… Il s’est passionné pour ces histoires courtes. Le professeur de français ayant donné un devoir à la maison comprenant la rédaction d’une critique littéraire, le jeune homme, enthousiaste, s’est totalement investi. Je crois avoir déjà signalé ici que je faisais, moi aussi, lecture des ouvrages étudiés en classe. Cette fois encore, et comme mon fils, j’ai été emportée par l’écriture somptueuse de Maupassant. Ses histoires, subtiles, oscillent entre le sombre et un comique grinçant. Qu’il soit question d’une femme abandonnant son chien par avarice ou d’un pauvre soldat prussien affamé, la plume est d’un réalisme époustouflant. Les mots suintent tantôt de cruauté, tantôt d’une fugace beauté. Chaque situation dissèque l’âme humaine dans ses travers, ses excès ou sa naïveté. Partager les lectures de nos jeunes donne l’occasion d’un échange riche entre générations et suscite ici débat et explications quant aux situations dépeintes par Maupassant. En plus de la complicité intellectuelle créée, cela permet aux parents d’accompagner  les enseignants dans leur rôle en stimulant le sens critique et la pensée de leurs élèves. Ces derniers peuvent faire belle la société de demain… fournissons-leur le maximum d’outils !

Sur ce, Joyeux Noël à tous… Regarder les jolies choses vous fera oublier j’espère, le temps de cette douce trêve, toutes les mauvaises !

 

Cette petite crapule de Maupassant. Arne Ulbricht. Les éditions du sonneur. 18,50€

Contes de la bécasse et autres contes de chasseurs. Guy de Maupassant. Pocket. 2,50€

 

 

 

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