lundi 16 septembre 2024

Roman de gare

 



Quoi ? Déjà septembre ? L’heure des cahiers neufs, des aubes fraîches, de la rentrée littéraire ? Cette dernière ne déverse pas moins de 459 nouveautés dans les rayons des librairies. Comment choisir ? De quoi avez-vous envie ? N’aimeriez-vous pas vous carapater, comme ça, l’air de rien, prolonger l’été et (re)partir à l’aventure ?

Sans bouger de votre fauteuil, grimpez avec Philibert Humm dans un wagon à destination de l’inconnu et du n’importe quoi. Après le succès de Roman fleuve, sur lequel l’auteur s’est reposé, l’argent ne coule plus à flots. Bon gré mal gré, il faut se remettre sur les rails de l’écriture. Souvenez-vous, dans le roman précédent, trois jeunes gens téméraires bravaient la Seine depuis Paris pour rallier l’embouchure du fleuve en canoë. Cette fois, en guise de chemin de croix, notre narrateur a choisi celui de fer. Il transpose donc la fresque fluviale au domaine ferroviaire et sert, en bref, « une resucée du livre précédent » ! Le lecteur est prévenu avec ce brillant éclair de lucidité. Philibert a décidé de voyager économique et léger. Muni de son baluchon (panoplie incontournable du vagabond), accompagné de son ami et acolyte Simon, il s’attelle à trouver la brèche d’une clôture pour pénétrer de nuit dans une gare de marchandises et guetter un train à la destination surprise. Tout se passe-t-il comme prévu ? Rien n’est moins sûr puisqu’en bons logisticiens, Simon et Philibert n’ont que sommairement anticipé (même si la liste de l’équipement a été longuement pensée et dessinée). Lorsque la rame dans laquelle ils sont parvenus à prendre place s’ébranle, le voyage commence enfin. Où les mènera-t-il ?

Autant le dire tout de suite, la quatrième de couverture donne le ton : « Roman de Gare est à même de fournir un loisir ou une distraction salutaire à ceux qui n’attendent plus grand-chose de la littérature et de la vie en général ». La dérision est bien au rendez-vous. La Note de l’éditeur nous fait sourire dès la septième ligne. A la vingtième, on rit franchement. Et on n’arrête plus. Avec une plume éminemment caustique, Philibert Humm décrit les improbables péripéties de deux branquignoles en quête d’aventure. Le narrateur se persuade d’accomplir son grand œuvre ; l’histoire ne dit pas si c’est en écrivant ou en entreprenant ce voyage mais les deux sont étroitement liés de toute façon. Il amuse son lecteur par son impréparation assumée et sa détermination à géométrie variable. L’auteur, lui, maîtrise la dose d’absurde qu’il insuffle à son sujet. Livre atypique, dans un style léché (on me souffle dans l’oreillette que l’héritage d’Alphonse Allais n’est pas loin), Roman de Gare sollicite l’intellect tout en finesse et réduit les prises de tête à néant. Dans un contexte toujours plus morose, on peut qualifier cette épatante épopée d’hilarante et ça, ça n’a pas de prix (enfin si, 21€, mais faut-il sacrifier notre plaisir à l’éventuelle acrimonie du banquier ?) ! Un ouvrage de rentrée idéal pour ne pas retomber trop vite dans le train-train.

 

Roman de gare. Philibert Humm. Editions des Equateurs. 21€.

 

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