samedi 1 février 2025

Le tatoueur d'Auschwitz



Alors qu’on commémore la libération du camp de concentration, je bascule de la littérature à l’écran avec la série Le tatoueur d’Auschwitz, inspirée par le roman éponyme.

Lale, juif slovaque, déporté au camp d’Auschwitz, se voit confier la tâche de tatouer les chiffres sur le bras de chaque nouvel arrivant. Un jour, se présente Gita et son regard lumineux ; Lale trouve alors une raison de se battre pour survivre. Devenu octogénaire, l’homme, émigré en Australie, raconte son histoire à une soignante spécialisée dans l’écriture de biographies. De leurs échanges, naît un témoignage à la fois émouvant et éprouvant. Dans le camp, Lale est à la merci de Stefan Baretzki, un soldat nazi dont le comportement à l’égard de son prisonnier oscille entre protecteur et bourreau. Lale ne sait jamais de quel côté l’humeur de son geôlier va pencher. Quant à Gita, préposée au tri des bagages, elle se livre, au péril de sa vie, à un trafic avec les bijoux. Ces quelques objets précieux servent de monnaie d’échange pour obtenir des passe-droits comme transmettre une lettre à Lale, acheter la complicité d’un kapo, sauver une vie ou adoucir le quotidien si rude. 

En choisissant ce programme, on sait que l’on va être confronté à des images terribles, même si la reconstitution atténue le sentiment d’horreur. Les événements relatés sont sidérants, la condamnation à mort, arbitraire, pour un regard de travers ou un faux pas, omniprésente. Le spectateur, confronté à l’innommable, ressasse cette question : Comment un être humain peut-il infliger ça à un autre être humain ? Pas de voyeurisme toutefois, seulement une tension extrême, rendue palpable par la succession régulière de gros plans montrant le visage de ceux qui tombent. L’imprévisible et l’humiliation jaillissent dans chaque séquence. L’histoire d’amour de Lale et Gita permet néanmoins de reprendre son souffle et trouver une lueur d’espérance dans cette noirceur. Dans d’autres récits (je pense à Primo Levi), les déportés, réduits à l’état de numéros interchangeables, voient parfois malgré eux leur humanité déserter dans leur lutte pour subsister. Moins brutale, la série souligne cependant subtilement les nombreux renoncements à leurs valeurs auxquels les protagonistes se soumettent. Une paire de chaussures volées à un mourant était souvent une condition nécessaire pour espérer ne pas rejoindre l’entassement des cadavres. D’un autre côté, ceux désignés pour le tri ou le tatouage obtiennent un statut moins dégradant et leur longévité s’en trouve augmentée. Est-ce “collaborer” ? Cruel dilemme. Heureusement, plusieurs scènes du film mettent en lumière la solidarité entre les prisonniers. A l’heure où les voix des derniers survivants sont en train de s’éteindre, il est indispensable d’entretenir le devoir de mémoire. La série, tirée d’une histoire vraie, remplit parfaitement cette mission.

Série Le tatoueur d’Auschwitz. A voir sur MyCanal ou en replay sur M6.

Le tatoueur d’Auschwitz. Heather Morris. Editions J’ai lu. 7,90 €.

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